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LE JOURNAL D'UNE TEAM IMPOSSIBLE

Goshiki no Fune : les affres du calligraphe

Écrite par : Kit • Catégorie(s) : Goshiki no Fune • Postée le 28/03/2016 09:00 pm


Bonsoir,

Le pinceau filait sur le papier, aussi preste qu’un cheval fougueux galopant avec fracas à travers la plaine, donnant vie à un paysage d’arbres et de rivière, de collines et de champs, avec autant de finesse que le permettaient les poils drus du pinceau. Or grande était la technique du maître qui traçait avec vigueur les contours de l’estampe. La vie elle-même prenait alors sa source dans les ténèbres du pigment, inondait la feuille tel un flot impétueux qui soudain s’arrêtait, s’asséchait quand l’homme relevait brusquement son outil. La mort, aride, s’emparait à son tour de l’œuvre, mais toujours l’artisan reprenait sa tâche et insufflait la vie inlassablement à ce papier jaunit.

Mais dessiner un paysage n’était pas suffisant, il fallait des êtres pour peupler ce décor aux traits fins, afin qu’ils puissent déambuler à travers les arbres et les montagnes. L’art, pour être abouti, nécessitait d’insuffler la vie et des sentiments à ses contours creux. Des scènes de rires et de joies, de ripailles et de moments partagés en famille. Mais le bonheur jamais seul ne pénétrait son œuvre, comme le soleil éclaire les coteaux d’une rizière qu’en n’en laissant un autre dans l’ombre, des sentiments plus obscurs jaillissaient des tracés sauvages du calligraphe. Terribles pensées contenues dans l’encre qui venaient noircir le cœur de ses créations. Les ombres de papier sont insatiables, cherchent sans cesse à dévorer plus de territoire. L’encre, et la passion féroce qu’elle contenait, débordaient de leur support. Flot sombre qui porte la voix des morts en quittant son lit, et dont l’écume imprégnait jusqu’aux tréfonds de l’âme du maître.

Les sentiments longtemps refoulés, portés par les reflux de cette marée obscure, atteignaient inéluctablement le corps des hommes. Une violente envie de tout effacer s’emparait alors de l’homme mais déjà l’encre séchait et fixait à jamais ses figures animales. Un terrible frémissement parcourait tous les habitants de l’illustration. Tous tremblaient sur leurs jonques et dans les bois, le long des collines et au sommet des forteresses de brume. Chaque fragment d’âme et de sentiment figé craignaient de voir la feuille se déchirer sous la colère de l’artisan, quand bien même étaient-ils à l’origine de sa folie. Il lui fallait peut-être détruire car son art rendait pérenne la moindre de ses inflexions. S’il consumait l’estampe, la mort seule habiterait encore celle-ci. Ainsi en allait-il dans le vieil atelier poussiéreux du calligraphe. C’était un monde d’encre et de sang, de noir et de blanc où tous n’aspiraient qu’à survivre à l’exceptionnelle averse qui parfois délave le doute de l’esprit des hommes. Un soleil radieux arrimait alors définitivement les pleins et déliés de l’encre sur le papier. Soleil et pluie s’entremêlait en une ultime danse fugace, pour donner naissance à un arc-en-ciel, jonque onirique qui les mènerait tous vers un avenir meilleur.





par Kit @ 28/03/2016 09:00 pm


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